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Visite Les Jardins de Matisse - Témoignage

Visite de l'EHPAD - Les Jardins de Matisse

Visite des Jardins de Matisse

Visite des Jardins de Matisse

Mercredi 25 septembre 2019, visite d’Ehpad, toujours une part d’inconnue, peut-être un voile d’inquiétude, ouvrir les yeux sur le grand-âge, sur la dépendance, peut-être aussi la peur de déranger, le souci de ne pas être perçus comme des voyeurs. Nous sommes de potentiels futurs dirigeantes et dirigeants, nous sommes là pour apprendre, nous questionner, nous préparer à nos futurs lendemains de manager.

Nous pénétrons dans l’accueil où nous sommes chaleureusement attendus, nous croisons le regard de plusieurs résidents confortablement installés. Premier ressenti, presque déconcertant, l’atmosphère y semble douce, voire légère, l’endroit est chaleureux, lumineux, un totem publicitaire très contemporain présente les activités de la semaine. Nous sommes-nous trompés de lieu ? Sommes-nous plutôt dans un hôtel chic ? Vite chasser cette pensée qui confine à l’indécence, nous sommes bien dans un Ehpad, poursuivons !

La visite commence, le propriétaire et directeur, M. Venard, nous présente son établissement. Il est passionné par son métier et impatient de nous le partager. Tout a été longuement réfléchi avant la construction des bâtiments en 2008 : projet novateur, et si l’on pensait autrement l’accueil du grand-âge !

Partout de vastes espaces, de généreuses baies vitrées, l’endroit semble baigner dans la lumière. Ici, on pratique l’aromathérapie, les diffuseurs d’huiles essentielles nous rappellent qu’à faible coût il est possible de créer une ambiance olfactive des plus agréables. Là, nouvelle surprise, l’art-thérapie y est à l’honneur, les résidents ont eux-mêmes peint ces toiles qui nous semblaient, à notre arrivée, des oeuvres contemporaines.

Nous pénétrons dans la partie restaurant, bien éloignée du concept du classique réfectoire. Ici également tout a été savamment pensé pour accueillir divers publics et différents degrés de dépendance. On nous parle de restauration internalisée, de circuit-court, de qualité gustative, de textures, d’équipe dédiée. Ca devient énervant, même le personnel a le sourire alors que nous dévastons un sol fraîchement nettoyé avec nos 15 paires de chaussures d’étudiants.

Puis nous découvrons l’unité Alzheimer avec son long couloir orné d’une fresque photographique nous donnant l’illusion de fouler le sable de la plage du Touquet et ses dunes fragiles. Les résidents y déambulent, un peu perdus mais accompagnés par des soignants dévoués. Nous découvrons l’effet positif de l’éclairage biodynamique, on nous parle thérapies non-médicamenteuses et traçabilité des soins, les chambres sont vastes et toujours cette lumière, plus douce ici, et la vue sur le jardin clos. C’est étrange, on pourrait très vite se sentir envahis par les émotions mais il y règne une atmosphère paisible, on a plutôt envie d’aider.

Nous poursuivons notre visite, déambulons de pièces en pièces, nous passons par l’accueil de jour, le PASA, la salle d’animation, l’atelier-mémoire, le petit coin réminiscence, la bibliothèque et le salon télé. Nous découvrons, attenante au jardin, une mini ferme avec poules et lapins, clapier et poulailler. Tout dans cet établissement semble avoir été pensé pour le mieux-être de nos aînés (les couleurs, les parfums, les plantes, la disposition des pièces, l’outil de travail, le personnel et même l’escalier intérieur surdimensionné qui sert de lieu d’exercice aux résidents). M. VENARD nous présente également les nombreuses activités proposées, la dynamique de sociabilisation dans laquelle s’inscrit l’établissement, les interactions programmées avec les enfants du personnel et ceux des écoles. Sans oublier la dernière acquisition : une Rosalie électrique destinée aux balades de proximité des pensionnaires.

Le concept semble parachevé mais M. Venard nous assure qu’il porte encore de nombreux projets : « Tous les ans on investit dans l’établissement, on rénove, on crée ». Nous achevons notre visite par les locaux techniques qui nous rappellent que l’empathie ou l’humanitude ne suffisent pas pour gérer un Ehpad. Nous y découvrons la face cachée d’un métier exigeant, technique, nécessitant de vastes compétences et connaissances. On nous parle alors de règles de sécurité, de gestion des risques, de mise en conformité, de plan Vigipirate, de dynamique de gestion du personnel, de lutte contre la légionellose, de plan bleu, de contrôle de la qualité de l’air, etc. Bref ça ne plaisante plus, bienvenue dans le monde de l’Ehpad, riche mais exigeant, bienvenue dans notre future profession, du moins pour celles et ceux d’entre nous qui s’apprêtent à l’embrasser.

Nous quittons le Jardin de Matisse en remerciant M. Venard et son adjointe de leur accueil. Difficile de rester indifférents après cette visite. De nombreuses questions se bousculent dans les têtes, éthiques ou politiques mais une seule certitude demeure : la perte d’autonomie est devenue un enjeu sociétal. Selon une étude de l’Insee de Juillet 2019, le nombre de personnes dépendantes pourrait atteindre 4 millions en 2050, nous en comptons environ 2,5 millions à ce jour.

Qu’attendons-nous alors de notre société, à quelles concessions sommes-nous disposées ? Devons-nous tout attendre de l’État Providence, devons-nous changer de modèle, devons-nous laisser nos soignants s’épuiser lentement et craquer, souvent par manque de moyens ? L’Ehpad-bashing, relayé massivement par certains médias et porté par des professionnels légitimement en colère, nuit malheureusement à l’image des établissements et occulte les nombreuses initiatives et la créativité de tous les acteurs du secteur, acteurs investis quotidiennement pour le mieux-être des personnes âgées. Il y a donc urgence. Nous avons su, au fil des ans, financer l’assurance maladie, l’assurance vieillesse, l’assurance chômage, devrons-nous un jour financer l’assurance perte d’autonomie au risque de voir se succéder des plans gouvernementaux, certes louables, mais peut-être insuffisants face à cet enjeu et à cette crise qui nous concerne tous.

Jean-Chistophe LANCEL, promotion MOSMS (Management des Organisations Sanitaires et Médico-Sociales)


Informations pratiques :

Date de l'évènement : du 2 octobre 2019 au 2 novembre 2019
Lieu(x) : Site de Pasteur

Publié le 2 octobre 2019

mise à jour le 9 juin 2021



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